lundi 30 janvier 2017

Voyages!






  Voyages !
 Au début du mois de janvier, retour de Normandie, le paysage bourguignon dans sa parure d’argent éblouissait le regard des voyageurs. Les cristaux du givre créent un monde féerique, fantastique, un monde où l’on ne serait pas surpris d’apercevoir les elfes venir orner la nature de ce manteau cristallin.
  Le temps étire ses jours, ses nuits. En ville aussi, entre Rhône et Saône, le givre pare les toits, arbres, les véhicules de ce décor blanchi. La neige aussi se met de la partie, pas longtemps, il faut être matinal pour participer à ce spectacle.
  Le 16 janvier de cette année, le vent du nord, la bise, est mordant. Il fouette, lacère les visages, s’engouffre sous les robes, dans les pantalons, il faut faire le gros dos. Je l’ai perçu dans son chant dans les bouches d’aération de l’appartement, je dis chant, je devrais dire qu’il grognait, son ire résonnait très fortement.
 La nuit s’annonçait glaciale.
  Mardi, il fait encore nuit, la ville dort. 6 heures, marcher dans le froid, braver le vent, je prends le tram’, direction la gare de Perrache. On ne peut pas dire que c’est la bousculade dans le transport, deux, trois pèlerins en route vers le boulot.
 6 h 45 mn, le TGV s’ébranle pour la capitale. Il déroule son allure dans le long tunnel de la nuit.
  Les candélabres, des villages, d’un jaune orangé sont comme des étoiles au ras du sol.
 Au loin, les lueurs du lever du jour étalent des couleurs d’un dégradant montant, violine, orange, blanche, elles s’unissent à celle de la nuit dans un dégradé descendant, bleu nuit, bleu et bleu ciel.
 L’hiver a déposé sa signature, des tapis blancs jonchent le sol, recouvrent les jeunes pousses des céréales. Les squelettes des arbres ressemblent à des chandeliers en argent aux multiples branches.
  Le paysage était resté féerique, pas la même qu’au début du mois. Le pays des elfes s’ouvrait de nouveau au regard, il appelait au rêve, le souvenir d’enfance dans un village blanc au cœur de l’hiver.
 La capitale nous accueille, sa banlieue aussi. L’agitation d’une ville en plein travail. La traversé du bois de Vincennes me ramène bien des années en arrière, celle de l’enfance partant au pensionnat dans un bois sous la neige de l’hiver 1956, la Marne, la Seine charriant des icebergs si elles n’étaient pas bloquées par les glaces. Les années, plus tard, la fête du trône déplacé du cours de Vincennes à Paris, pour la pelouse de Reuilly, les promenades en barque sur le lac, mais aussi les dimanches avec la chienne et le chat, tenu en laisse. Plus tard avec les enfants, et aujourd’hui pour accompagner ma marraine dans sa dernière demeure, son long voyage vers l’ailleurs.
  Le retour, le chemin à l’envers, enfin presque, retrouver les mêmes paysages, ou presque, c’est le couchant et sur les contreforts du Morvan l’éclat orangé du soleil dépose ses feuilles d’or sur dame nature, les arbres reluisants de ce voile doré.
 L’imagination ne joue pas des tours, une jeune femme est aussi prise par l’émerveillement du paysage, elle l’immortalise sur son smartphone.
 Sans être étonné, simplement jouisseur d’instants dérobés de la beauté que nous présente le monde dans lequel nous passons.

B.Cauvin©17-23/01/2017


samedi 21 janvier 2017

Ombre de la vie!




L’esprit d’Hadès s’en vient souffler sur la forêt des hommes,
Porté par son compère Éole porteur des vents puissants, 
Les feuilles sur les branches frissonnent, 
Aux quatre saisons coupe le sang.

Au printemps, le jeune bourgeon éclos, 
S’arrache de sa source nourricière, porté par les flots, 
D’un vent capricieux,
Au bien-être peu soucieux.

L’arbre, plusieurs fois centenaire, gémit de ses blessures,
Les larmes de sève coulent sur les feuilles agonisantes, 
Dans son âme tout n’est que fêlure, 
Dans ses veines passent les gouttes de sang luisantes.

Hadès, par la bouche béante et hurlante d’Éole, chante sa joie, son royaume va s’enrichir d’être nouveaux. Il souffle dans les masures, il chante entre les lames d’acier des sculptures fièrement dressées, dans les arbres de vie auxquels sort bien des cris.
La jeune pousse, trop isolée, a été déracinée et s’est envolée  dans ce nuage elliptique dévastateur.
Serrons-nous les uns contre les autres, protégeons-nous, faire face à cet ennemi, certains tomberont fièrement.
L’arbre, bien dressé sur ses racines, sent le sol vibrer sous lui. “Pourtant, je ne fais pas partie de la race des arbres qui marche” se dit-il. 
Le combat est âpre, dur, les branches se cognent, s’entrechoquent, le sol tremble, les feuilles s’envolent, le vieil arbre lutte comme les autres, résiste aux assauts, des branches de sa cime se plient, des rameaux cèdent et vont choir sur le tapis de mousse, de feuilles ou du lierre rampant, les fougères s’écartent et les laissent ainsi faisant une haie d’honneur aux fiers combattants à leurs passages.
 Un grand fracas résonne dans la forêt, un arbre, dans la force de l’âge, s’écroule, Éole, de ses bras, l’a entortillé et il vacille, brisant des frères à son passage et il s’étend sur le sol.
 Le vieil arbre pleure ses membres perdus. Il sait, que de jeunes poussent feront leur apparition, mais dans ses veines, il sent bien la liquéfaction de ses artères.
Le calme revenu, il entend déjà le cri de la cognée venant faire son œuvre. Il le sait, le devine, il ne se plaint pas de son avenir, il faut laisser la place, il en est ainsi. Il ne peut se révolter, à moins qu’il ne demande à Éole de l’emporter avec lui loin de son terroir.
  Les hommes se lamentent de ce désastre, il les entend, ils sont comme lui en colère contre les éléments.
 Il les voit ramasser ses branches, celles des frères de la forêt aussi. Il entend les passe-partout scier les troncs couches sur le tapis de feuilles.
 Il frémit, tremble, sursaute, le premier coup de cognée vient de le frapper à sa base. Son sang suinte de l’écorce, de ses veines, l’entaille est bien faite, il sait qu’il n’est plus utile dans ce monde, il a beaucoup perdu en luttant contre les vents. Étêté il est vulnérable. Les gestes sont précis, bien saccadés, le vieil arbre vacille, un cri des bûcherons et il tombe de tout son poids sur le sol.
 Les hommes reviennent vers lui, l’admirent, lui font honneur, il fera de belles planches pour des meubles ou un parquet sur lequel des enfants joueront comme dans des temps lointains d’autres venaient jouer dans ses bras. 

B.Cauvin©15-20/01/2017

De passage sur se site, j'en profite pour vous souhaiter une bonne et merveilleuse année 2017